Alexandre D'Astous
Des pistes pour faire face aux changements climatiques
En tant que spécialiste de la budgétisation publique sensible aux changements climatiques pour le Fonds monétaire international (FMI), le maskoutain Michel Filion énonce des pistes pour les villes telles que Saint-Hyacinthe afin de mieux faire face aux changements climatiques.
L’ex-candidat à l’investiture du Bloc Québécois dans Saint-Hyacinthe-Bagot en 2013 compte plus de 25 années d’expérience internationale. Il se spécialise dans les diagnostics, les audits, la mise en œuvre de projets et la budgétisation axée sur les résultats. Depuis 2004, il a collaboré avec 65 gouvernements dans plus de 35 pays.
« À l’international, je fais partie d’un groupe d’experts dans un registre du Fonds monétaire international qui se spécialise dans des interventions en matière fiscale et budgétaire. En ce moment, partout sur la planète, les budgets des États commencent à être orientés vers des mesures d’adaptation et d’atténuation des changements climatiques », précise celui qui collabore aussi avec la Banque mondiale depuis plusieurs années.
Le parcours de Michel Filion à l’international a débuté en 1989 comme volontaire au Pérou.
Le budget vert
« Dans les bonnes pratiques en gestion publique, on invite tous les gouvernements de n’importe quel niveau, incluant par exemple une ville comme Saint-Hyacinthe, à annexer à leur budget annuel une section qui décrit l’impact environnemental et l’impact des politiques sur les changements climatiques. Ce budget vert implique que chaque membre de l’équipe de la Ville de Saint-Hyacinthe soit conscient que les gestes qu’il pose ont une incidence sur l’environnement et les changements climatiques qu’ils peuvent accélérer ou ralentir », explique le spécialiste.
Les changements climatiques viennent accélérer plusieurs phénomènes comme le débordement des rivières ou les feux de forêt.
Le budget vert implique également une planification de la part d’une administration municipale.
Le marquage vert
Michel Filion explique qu’une des meilleures manières pour un gouvernement fédéral, provincial ou municipal d’amorcer un processus de lutte aux changements climatiques est ce qu’il appelle le marquage vert.
« Avant de se doter d’un budget vert, commençons par un marquage vert. On prend l’ensemble des dépenses. C’est souvent plus facile de commencer uniquement par les investissements. Par exemple, la Ville de Saint-Hyacinthe a un plan triennal d’investissements. Elle peut prendre ce plan et regarder chacun des investissements prévus et se demander si cet investissement contribue à l’adaptation aux changements climatiques et à la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES) ou, au contraire, s’il contribue au problème. On passe chaque ligne du plan triennal et on peut voir ce qui est vert et ce qui ne l’est pas », indique M. Filion.
Des outils disponibles
Michel Filion signale qu’il y a des logiciels et divers outils disponibles pour les municipalités au Canada pour s’engager vers un budget vert. Des formations sont aussi accessibles pour aider les villes et les municipalités à mesurer l’impact des changements climatiques, par exemple sur l’entretien des équipements.
Le spécialiste est conscient que la lutte aux changements climatiques a un coût. « Par exemple, la taxe carbone a un coût, mais ce qu’on doit décider, c’est si on veut payer tout de suite ou plus tard », dit-il.
Préoccupation visible à Saint-Hyacinthe
M. Filion a noté une préoccupation de la Ville de Saint-Hyacinthe au cours des dernières années pour tout ce qui concerne le développement durable. « Il y a une politique du développement durable à Saint-Hyacinthe, ce qui me fait dire qu’il semble y avoir une préoccupation. Souvent, cette préoccupation est portée par un souci de communication. Je ne suis pas certain que cette préoccupation se traduit par des changements fondamentaux. C’est là que le marquage vert public et transparent vient dépasser la simple communication. Cela permet d’améliorer les gestes que l’on pose ».
Pour le spécialiste, le premier défi de tout conseil municipal souhaitant mettre en place une gestion plus verte est de ne pas avoir peur. Une façon de contourner cette peur, c’est de faire un premier marquage vert privé.
« On pourrait commencer par un marquage privé, juste pour regarder le portait de notre plan triennal d’investissements sous une loupe verte. Ça devient comme un diagnostic de la situation ».
Analyse des vulnérabilités
En même temps que le marquage vert, Michel Filion encourage les administrations municipales à faire l’analyse de leurs vulnérabilités. Il donne l’exemple d’une ville entourée d’une forêt de pins où la chaleur augmente et que l’été est sec. La vulnérabilité serait qu’un incendie de forêt se propage à un quartier résidentiel.
« Si une ville, comme c’est le cas pour Saint-Hyacinthe, a plusieurs résidences à proximité d’une rivière, la vulnérabilité est la variation des précipitations et du niveau de l’eau dans la rivière. Cela peut intervenir sur la gestion des déchets et des eaux usées. Le traitement des eaux usées dépend d’un certain niveau d’eau dans la rivière. Si le niveau d’eau change, la municipalité pourrait devoir changer de système d’épuration des eaux ».
Des villes reconfigurées
Michel Filion estime que dans quelques années, les villes du Québec pourraient être reconfigurées si les dirigeants décident de prendre acte des changements climatiques. « Les nouveaux développements dans nos villes seront plus denses avec plus de parcs. On va favoriser la végétalisation des toits. Il va y avoir plus d’énergie éolienne et solaire. On va favoriser les déplacements actifs. La place pour la voiture devrait diminuer. Le périmètre de nos villes ne devrait pas s’agrandir ».
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