Pascal Audet
Caroline Laplante, de fil en aiguille
Coup de foudre pour nos artistes, c’est une série de portraits mettant en vedette des boursiers du Conseil de la culture de Saint-Hyacinthe.
Caroline Laplante est venue au monde à Saint-Jude dans les années 70. C’est une artiste aux multiples talents — écriture, performance, arts textiles — qui, au fil du temps, a occupé divers emplois, dont celui de bouquiniste, métier qui l’a gardée en contact avec la création.
Revendiquer par la création
Plus récemment, son intérêt pour l’art ainsi que ses expériences personnelles l’ont amenée à animer des groupes d’art communautaire au Centre de femmes L’Autonomie en soiE (CFAES). Les projets qu’elle présentait étaient motivés par des revendications sociales et féministes. « Chaque étape du processus devait être accompagnée par l’art », précise-t-elle. Les créations empruntaient des moyens d’expression variés : impro, perfo, court métrage de fiction, peinture, écriture.
Un jour, elle a entendu parler d’un cours sur l’étude de la pratique artistique donné par l’Université du Québec à Rimouski (UQAR). Elle a décidé de s’y inscrire. « Je sentais que j’étais rendue à un moment où il fallait que j’aie le sceau universitaire pour être prise au sérieux ». Après cette formation, elle a débuté une maîtrise en étude des pratiques psychosociales, toujours à l’UQAR.
Faire de l’art pour prendre son temps
Ses expériences de travail et de vie ont certainement eu une influence sur sa vision de l’art et sur sa démarche artistique qu’elle définit de la façon suivante : « je m’intéresse aux liens entre le visible et l’invisible, entre le fini, le non fini et l’infini, l’importance des gestes, le travail de la délicatesse […], l’art est ce qui nous reste de réel pour toucher à l’irréel… ». Son travail de broderie est particulièrement intéressant et empreint d’une délicatesse et d’une grande sensibilité. Elle adhère au mouvement Slow Art et son travail est fait à la main, lentement. « Ce qui me prend 10 à 15 h à la main, je le ferais en un après-midi avec une machine à coudre. »
Le féminisme au cœur de tout
Elle intègre les thèmes féministes dans sa pratique, notamment dans une série de poupées en tissus qu’elle fabrique une à une et qui représentent certains stéréotypes féminins, comme la figure de la sorcière, associée au climat misogyne dans la société actuelle. Son engagement féministe se confirme avec son intention de rédiger son mémoire de maîtrise en langage épicène (dont le féminin et le masculin ont la même forme).
À l’été 2018, une bourse du Conseil de la culture de Saint-Hyacinthe lui a permis de faire une résidence d’artiste chez Sylvie Tourangeau, une formatrice en art performance très reconnue au Québec. Cette résidence fut très instructive et lui ouvrit de nouvelles perspectives créatives qu’elle exploitera bientôt. Caroline a l’intention de poursuivre ses études au doctorat en recherche création, une fois sa maîtrise terminée.
Constamment impliquée dans sa communauté, Caroline souhaite voir la création d’un centre d’artistes autogéré dans la région. Selon elle, ça aiderait beaucoup à la vitalité de la communauté artistique d’ici, autant pour ce qui est des ressources et équipements que pour l’aspect social.
L’art pur
Je suis une fan de l’artiste Caroline Laplante. Le mot qui me vient en tête: pureté. Comme un enfant, comme un oiseau. Rien de tapageur ni de séducteur, l’art tel qu’il doit être: gratuit comme l’amour, comme la vie. Et ses thématiques embrassent et rendent hommages aux femmes, aux filles, fortes, modestes, vraies.