Culture
NOUVELLE EXPOSITION À EXPRESSION

Comme entrer dans un TEMPLE

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Lorsqu’on arrive dans la grande salle du Centre EXPRESSION, c’est un peu comme si on pénétrait dans un temple. Il ne manque que les effluves d’encens. La déesse Guan Yin nous y accueille. À ses pieds, une spectaculaire courtepointe confectionnée avec 500 vieilles guenilles de mécanicien que Guy Laramée a cousues à la main, une à une. Des gestes répétitifs – comme un mantra manuel – pour mieux vivre le deuil de sa mère. Voilà. La table est mise pour l’exposition Accrocher les roches aux nuages.

  • jusqu’au 12 août, à EXPRESSION
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Guan Yin « pour Fernande », installation : cèdre, coton, lin.
Photo : Paul-Henri Frenière.

À la gauche de cette installation, un livre géant dans lequel l’artiste a sculpté un paysage montagneux. En se rapprochant, on aperçoit des mots qui semblent émerger des parois rocheuses, entre autres ceux-là : « Sache que forme n’est que vide… »

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PRAJNA PARAMITA HRIDAYA SUTRA, livre d’artiste sculpté. 56 x 38 x 20,5 cm.
Photo : Paul-Henri Frenière.

Ce sont des mots tirés du Sûtra de la parfaite sagesse, un texte bouddhiste qui a inspiré Guy Laramée. Le livre compte exactement 1000 pages. Sur chaque page, on a reproduit le même texte ; d’un côté en français, de l’autre en anglais. Ainsi, lorsque l’artiste a sculpté le livre avec un puissant jet de sable, les mots sont apparus, comme surgissant de l’intérieur.

Sur les murs de chaque côté, de grandes toiles qui semblent représenter des paysages. « Mais ce ne sont pas de simples paysages, reprend l’artiste, c’est une quête du réel dans le néant ».

Guy Laramée peut prendre un mois pour réaliser une seule toile. Il s’exécute à partir de photos qu’il a prises au cours de ses randonnées au Québec ou lors de ses voyages.

La constante étant cette espèce de voile brumeux qui nous empêche de voir le décor avec netteté. Il a pourtant mis des heures à reproduire très exactement ce qu’il y avait sur le cliché. « L’important c’est l’émotion ressenti devant la scène, explique-t-il. Ce qu’on ressent devant quelque chose de beaucoup plus grand que nous, des lieux qui nous invitent à la contemplation. »

Contemplation : voilà un mot-clé dans la compréhension de l’œuvre de Guy Laramée. Il avoue bien simplement avoir traversé des moments difficiles dans sa vie, des moments de doute profond. « Comme à peu près tout le monde, ajoute-t-il, et particulièrement les artistes, j’imagine. »

Sa quête de sens l’a amené à voyager et à s’intéresser à la spiritualité : chamanisme, soufisme, bouddhisme zen. Il en a tiré des enseignements, semble-t-il, qu’il intègre à son art. Mais il s’en défend bien : « C’est une chose que nous apprennent les voies contemplatives : il n’y a pas de technique, pas de recette quand on parle de transcendance. »

Donner une nouvelle vie aux livres

Derrière le muret sur lequel s’adosse la déesse Guan Yin, apparaît une série de livres sculptés présentés sur des socles. Encyclopédies, dictionnaires, pile de magazines qui sont érodés à la manière Laramée. Des livres qui allaient être détruits et qu’il a récupérés pour leur donner une nouvelle vie.

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Photo : Paul-Henri Frenière.

Parlant de nouvelle vie, ce sont ces livres qui ont procuré à Guy Laramée la notoriété. Ses œuvres se retrouvent, entre autres, au Musée national des beaux-arts du Québec, à la Bibliothèque nationale, dans la collection Loto Québec, Bennet Jones à Toronto, Ex Machina à Québec, Allan Chassanof à New York et dans de nombreuses collections privées à travers le monde.

À ce propos, il s’est rendu compte récemment de la puissance des réseaux sociaux. Des commandes pour ses œuvres ont soudainement fusé de toutes parts par internet. C’est qu’un célèbre critique d’art de Londres venait de parler de ses créations sur son blogue.

Comme une illumination

Cette étrange idée de sculpter les livres lui est venue comme une illumination. C’est en regardant travailler un ouvrier qui nettoyait une pièce de métal au jet de sable que des images, en cascades, ont traversé son esprit. Sa passion pour les paysages, la nature, l’histoire, l’art et l’anthropologie pouvaient se matérialiser en utilisant un objet pour lequel il a développé, au fil du temps, une relation amour-haine : le livre.

Artiste interdisciplinaire, Guy Laramée a touché à tout depuis 25 ans : l’écriture scénique, la mise en scène, la composition musicale (notamment pour Robert Lepage), la facture d’instruments de musique, le chant, la vidéo, la scénographie, la littérature et depuis 2004, il se consacre uniquement à la peinture et à la sculpture.

EXPRESSION, Centre d’exposition de Saint-Hyacinthe

Accrocher les roches aux nuages

Guy Laramée

Commissaire : Danielle Lord

Du 2 juin au 12 août