Devenir Margot, le rôle de sa vie!

Autrice, comédienne, scénariste et metteure en scène, Marika Lhoumeau a d’abord étudié en interprétation à l’Option théâtre du Cégep de Saint-Hyacinthe. Elle a poursuivi sa formation en théâtre à Montréal, à l’INIS et elle étudie présentement à la maîtrise à l’UQAM. Entre 2018 et 2020, Marika a visité son père atteint de démence mixte au CHSLD.  De cette expérience sont nés deux balados : Devenir Margot en 2021 et Devenir Roger en 2022.  Dans cette même lancée, l’autrice a rédigé l’essentiel de leurs dialogues et de ses réflexions dans Devenir Margot. Fragments d’un faux souvenir.

Le début

Ce récit vécu, très intime, c’est celui de Roger, qui a grandi dans les années 1930 et qui, en 2018 environ, reçoit un diagnostic de maladie d’Alzheimer et démence vasculaire. Cet homme pourtant en santé, sportif, s’est soudainement vu diminué : « […] un jour, tentant d’introduire une clé dans la serrure par le mauvais côté, il se retourne vers moi, et s’exclame, les yeux paniqués : « Coudonc, je suis en train de devenir fou, moi. »

Puis, d’autres événements surviennent : une fugue, des pertes de repères de plus en plus fréquents… La famille n’aura d’autre choix que d’installer Roger en résidence.

Un premier choc

Lors de ses visites au CHSLD, Marika enregistre ses dialogues avec son père à son insu. Son père ne la reconnait pas. Marika lui montre une photo d’elle et sa sœur :

– C’est qui ces deux petites filles-là?

Il plisse les yeux, scrute attentivement les visages.

– Mmm… J’les connais pas.

Marika essaie de le lui rappeler doucement.

– Ben voyons, si j’avais eu des enfants, je le saurais.

Un autre jour de visite, alors qu’elle entre dans la chambre de son père, Roger confond sa fille avec une ancienne flamme : Margot. Décontenancée, Marika répond d’abord par la négative puis choisit de devenir Margot, une amie connue à Bedford dans les années 1930.

En jouant le rôle de Margot, l’autrice a permis à son père de raconter quelques souvenirs de son enfance avec ses amis. Elle l’écoute, tente de comprendre son univers. Leurs échanges sont troublants, mais plein d’amour et de tendresse.

Des recherches et des lectures

Impuissante devant la maladie de Roger, Marika rejoint un groupe d’entraide de proches aidants. Il est question du mensonge thérapeutique pour ne pas créer d’anxiété chez le patient.

« Pas de recette miracle, donc. De réponse infaillible. De mode d’emploi. Il faudra continuer à tâtonner. Essayer, trébucher, se relever. Surtout, se pardonner. »

Au fil des dialogues, Marika s’interroge, cite des extraits de ses lectures, de ses rencontres avec des spécialistes.

« Pourquoi la vieillesse n’est-elle pas une période de la vie que l’on chérit avec autant d’amour et de délicatesse que la petite enfance? Pourquoi on traite les bébés comme la prunelle de nos yeux, alors qu’on abandonne les vieilles personnes vulnérables comme si elles avaient déjà disparu? »

Cette lecture, qui accompagne bien le balado du même nom, nous invite à revoir notre relation avec les personnes atteintes de démence ou de la maladie d’Alzheimer. Cette histoire, loin d’être triste, s’avère plutôt lumineuse.  La comédienne nous touche droit au cœur avec ce rôle inoubliable.

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Marika Lhoumeau. Devenir Margot. Fragments d’un faux souvenir. Éditions Somme Toute. 2024, 117 p.