Paul-Henri Frenière
Karine Payette et l’ombre d’un doute
La locution « sans l’ombre d’un doute » évoque la certitude, la véracité, l’évidence même. L’exposition de l’artiste Karine Payette, au centre Expression jusqu’au 23 avril, propose tout le contraire.
Intitulée justement « L’ombre d’un doute », cette nouvelle proposition regroupe des sculptures, des installations, des illustrations et des vidéos qui ont toutes un point en commun : le doute. Parmi la production foisonnante de la jeune artiste depuis 2010, la commissaire Anne Philippon a choisi d’aborder l’expérience sous cet angle.
« Je connais Karine depuis longtemps et je trouvais que le thème du doute, de l’incertitude, voire de l’inquiétude, revenait souvent dans son œuvre, explique-t-elle. Nous avons décidé de regrouper ces divers éléments pour cette exposition à Saint-Hyacinthe. »
Dès son entrée dans la salle, le visiteur aperçoit une table bancale de laquelle jaillit un bol de céréales – des Rice Krispies, précise-t-on – qui se déverse jusqu’au plancher. Il en résulte une grande marre de lait disproportionnée par rapport au contenu potentiel dudit bol.
Intitulée « L’autre dimanche matin », cette installation peut évoquer divers scénarios. Anne Philippon en énumère : « Le départ précipité à l’annonce d’une bonne ou d’une mauvaise nouvelle; une lutte d’enfants qui a mal tourné; un drame familial ou encore les secousses d’un tremblement de terre. »
« Chose certaine, la mise en scène réfère à un état psychologique, à la propension humaine – parfois incontrôlée – qui consiste à amplifier les détails, à exagérer l’importance de certains éléments, à dramatiser des situations qui ne sont peut-être qu’anodines. Ce faisant, Karine nous invite à nous interroger sur l’apparence des choses et des événements » précise-t-elle.
Un grand souci du détail
Une caractéristique importante du travail de Karine Payette est sans aucun doute, cette fois, son grand souci du détail. Par exemple, dans l’installation précitée, chaque céréale a été fabriquée individuellement : leur forme, leur couleur exacte et leur disposition dans la marre de lait sont rigoureusement tenues en compte. Même la poussière sur une tablette est disposée avec réalisme.
On retrouve ce même souci du détail dans la sculpture représentant un chien affalé et barbouillé de peintures (Canevas, 2016). Ou encore dans l’oeuvre Subjuguer, 2014, où l’on voit un gros poisson rouge dans une main. Le bras, la main et le poisson sont réalisés avec un réalisme saisissant.
« Les plus récentes œuvres de Karine s’inspirent des relations entre l’humain et l’animal, reprend Anne Philippon. Elle met en place une forme de résistance entre l’animal et l’humain, tentant d’inverser leurs rôles habituels. Elle interroge aussi l’attitude de l’homme qui, d’habitude, exerce son emprise sur la nature ».
L’exposition se conclut d’ailleurs par une vidéo qui tourne en boucle où l’on voit un chien qui obéit aux commandements de son maître (L’Être aux aguets, 2016).
Karine Payette est née à Montréal où elle vit et travaille. Elle détient une maîtrise en arts visuels et médiatiques de l’Université du Québec à Montréal. Elle a enseigné la sculpture au Cégep de Saint-Hyacinthe à l’automne 2015.
Depuis 2010, ses œuvres ont été présentées dans diverses expositions individuelles et elle a participé à plusieurs expositions collectives.
Post-Scriptum :
L’ombre d’un doute
Artiste : Karine Payette
Commissaire : Anne Philippon
Jusqu’au 23 avril 2017
Expression, Centre d’exposition de Saint-Hyacinthe
495, avenue Saint-Simon
Saint-Hyacinthe
450.773.4209
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