Anne-Marie Aubin
Quand Saint-Hyacinthe inspire des auteurs
Annie Joan Gagnon et Philippe Chagnon ont dernièrement publié chacun un livre dans lequel leur ville natale sert de décor. Annie Joan Gagnon relate des souvenirs de son adolescence maskoutaine dans Une amitié éternelle et sacrée. De son côté, Philippe Chagnon, dans son roman À reculons, met en scène un écrivain vivant à Montréal appelé à retourner à Saint-Hyacinthe pour régler un problème. Une même ville, des lieux connus, deux textes très différents.
À reculons
Martin, écrivain vivant à Montréal, reçoit un appel qui le force à quitter Roxanne, sa conjointe enceinte, pour retrouver ses parents à Saint-Hyacinthe, car son grand-père se meurt. L’idée de laisser Roxanne seule pour affronter la famille l’angoisse : « Il y avait bien aussi cette commande de la part d’une revue de littérature, écrire un texte d’autofiction sur un thème de mon choix, dont je n’avais toujours pas débuté l’écriture ». Il part donc chez ses parents à reculons. Repoussant sa visite à l’Hôpital Honoré-Mercier où sa mère veille sur son grand-père, il marche dans la ville, prend un café, observe et prend des notes, toujours en quête d’inspiration.
Divers éléments louches se bousculent : un tatouage, une enveloppe dans une revue, les magouilles de la blonde de son grand-père, la rencontre d’une ex-amoureuse… Tous ces événements l’entraînent dans une situation pour le moins bizarre. Voilà la matière pour son autofiction, celle que nous lisons.
« Les rêves – tout comme la téléréalité – n’ont pas de limite à leur absurdité. »
Divisée en trois parties, plus ou moins liées, cette narration nous tient jusqu’au dénouement inattendu alors que Martin se rend au Van Houtte boire un thé. Avec humour, Philippe Chagnon valse entre le roman noir et l’autofiction et s’amuse à brouiller les pistes. Dans cette mise en abyme, les chapitres très brefs tissent l’intrigue de ce récit parfois déroutant, mais très bien ficelé.
Une amitié éternelle et sacrée
Annie Joan Gagnon réunit dans ce livre différents événements et anecdotes de son adolescence dans la région. Tout débute au Collège Saint-Maurice pendant le cours d’histoire de Réal où Karine et Annie se rencontrent et deviennent des amies inséparables. Ces premières pages racontent brièvement la relation d’Annie et Karine, le tout illustré en couleur par l’autrice. Ensuite, s’enchaînent plusieurs chapitres brefs relatant diverses aventures typiques de l’adolescence. En 4e secondaire, au collège, elles tenteront par tous les moyens d’enfreindre les règlements. Puis, au Cégep de Saint-Hyacinthe, Annie conjugue difficilement travail-études. C’est à l’UQAM, en Études littéraires, qu’elle poursuivra ses études.
Il est moins question de l’amitié entre les deux filles que des expériences d’Annie. On a l’impression qu’elle nous livre des fragments de son journal intime de l’époque relatant ses relations amoureuses parfois malsaines, ses ruptures, ses premiers emplois, ses rêves et ses déceptions. Narré de façon chronologique, chaque petit texte aurait pu être daté. On y reconnait certains faits tel l’incendie ravageur du Collège Saint-Maurice en avril 1992, après lequel Annie se voit contrainte de terminer son secondaire dans des locaux temporaires.
Quelques photographies d’archives témoignent de l’amitié des deux jeunes filles devenues femmes – et mère, dans le cas de Karine. Sans doute les gens de cette génération prendront plaisir à se rappeler cette époque pas si lointaine, avant l’avènement des téléphones cellulaires et d’Internet.
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Chagnon, Philippe. À reculons, Hamac éditeur, 2022, 140 p.
Gagnon, Annie Joan. Une amitié éternelle et sacrée, Le lys bleu éditions, 2022, 93 p.
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