Société

Airbnb : un obstacle de plus pour les locataires

De gauche à droite : Pier-Alexandre Nadeau-Voynaud, intervenant, Daniel Rondeau, coordonnateur par intérim de l’organisme Logemen'mèle. Photo : Courtoisie

La pénurie de logements est bien réelle. Alors que plusieurs locataires risquent de se retrouver sans logis le 1er juillet, il n’y a jamais eu autant d’offres de logements offertes sur Airbnb dans la région maskoutaine.

Une recherche réalisée par le Journal Mobiles a permis de découvrir qu’à la mi-mai, 43 offres de location étaient offertes sur la plateforme d’Airbnb dans la MRC des Maskoutains. Ce nombre peut toutefois être ramené à 33 si on retire les cinq chambres qui semblaient être des chambres d’étudiants disponibles durant l’été et cinq offres provenant de résidences à vocation résolument touristique, soit la Villa Casavant et la maison de l’ancien maire T.-D. Bouchard.

De gauche à droite : Pier-Alexandre Nadeau-Voynaud, intervenant, Daniel Rondeau, coordonnateur par intérim de l’organisme Logemen'mèle. Photo : Courtoisie

La majorité de ces 33 offres sont des logements entièrement meublés et disponibles en tout temps de l’année. Ils sont répartis dans la plupart des quartiers de Saint-Hyacinthe et on en retrouve quelques-uns à Saint-Damase et à Saint-Pie.

« Ces 33 inscriptions, c’est équivalant du nombre de gens qui, en ce moment, sont en recherche active d’un logement, commente Pier-Alexandre Nadeau-Voynaud, intervenant au Comité Logemen’mêle. On prévoit qu’il y en aura même davantage le 1er juillet. C’est assez décourageant de voir cela. »

Pour son collègue Daniel Rondeau, coordonnateur par intérim de l’organisme, Airbnb accentue la crise de logement, car ces logis dédiés aux touristes ne sont plus disponibles aux locataires.

« Je n’ai rien contre le tourisme, mais ça crée encore plus de rareté dans le marché, affirme-t-il. Avec les prix des loyers qui ne cessent d’augmenter, c’est la classe moyenne qui est attaquée de plein front. Il manque résolument de logements pour les familles et la classe moyenne. »

Rappelons qu’au départ, le service Airbnb a été créé pour permettre aux voyageurs d’offrir leur résidence au moment où ils sont absents. Toutefois, il est vite devenu un commerce en soi. Dans plusieurs villes touristiques, on ne compte plus les logements offerts aux touristes de passage, la plupart du temps dans des quartiers résidentiels.

Saint-Hyacinthe n’y échappe pas. Plusieurs offres répertoriées sur Airbnb proviennent d’individus qui mettent en location cinq logements et plus. La plupart facturent des taxes de séjour comme l’exige Revenu Québec, mais seuls quelques-uns affichent leur numéro de permis provincial.

Politique du logement exigée

Selon Daniel Rondeau, le nombre d’offres Airbnb sur le territoire démontre encore davantage la nécessité de se doter d’une politique du logement.

« Si la Ville et la MRC se dotaient d’une telle politique, on pourrait contrer plusieurs problématiques liées au logement. Airbnb en est une parmi d’autres : les rénovictions, les changements d’utilisation ou les augmentations injustifiées. Par exemple, aux Airbnb, on pourrait imposer des compensations financières qui pourraient ensuite être réinvesties dans le logement abordable à vocation familiale. »

À Montréal, certains quartiers ont choisi de limiter le nombre de logements dédiés aux touristes. D’autres vont plutôt les délimiter à des secteurs bien précis afin d’assurer la tranquillité des résidents.

 

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Airbnb compléterait l’offre hôtelière

Nancy Lambert est la directrice du tourisme et des congrès à Saint-Hyacinthe Technopole. Si elle savait que la plateforme Airbnb était bien présente dans la région maskoutaine, le nombre d’offres est plus élevé qu’elle le pensait.

Comment voit-elle cet apport dans le milieu touristique local? « Sur le plan touristique, Airbnb complète l’offre disponible en hôtellerie, a-t-elle déclaré. Quand on parle de visiteurs, ça comprend autant le tourisme d’agrément que le tourisme d’affaires. En raison des entreprises internationales qui sont présentes dans la région, certains travailleurs doivent séjourner à Saint-Hyacinthe durant un certain temps. L’offre hôtelière n’est pas toujours adaptée à cette clientèle. Donc, Airbnb répond à un besoin. »

L’essor d’Airbnb fait partie d’une évolution dans le milieu du tourisme. La plateforme est venue remplacer les gîtes touristiques qui ont disparu à Saint-Hyacinthe. Airbnb s’est développée en marge de la promotion touristique traditionnelle; ses offres ne s’affichant pas sur le site de Tourisme Saint-Hyacinthe. Mme Lambert a indiqué qu’il s’agit d’une question sur laquelle il faudra se pencher éventuellement.

Des plaintes du côté de la Ville

Selon Jennifer Drouin-Ostiguy, conseillère en communications à la Ville de Saint-Hyacinthe, ces logements doivent être offerts dans des zones qui permettent les résidences de tourisme et un certificat d’occupation commerciale est exigible.

Celle-ci affirme qu’au cours des dernières années, la Ville a reçu quelques plaintes provenant du voisinage de ces logements loués à des touristes.

Le service de l’urbanisme est-il préoccupé par le nombre d’offres sur son territoire? « Pour le moment, ce n’est pas une préoccupation. Par contre, il est possible que nous allions revoir nos dispositions concernant l’hébergement à court terme lors de la refonte réglementaire. »