Société
Les visages de la crise du logement à Saint-Hyacinthe (2)

Pénurie de logements sociaux pour les personnes vivant avec un trouble de santé mentale

De gauche à droite, Françoise Pelletier, Emilie Auclair, Annie Guindon, Christiane Laplante, Céline Langelier, Sherylane Turcotte, Laurence Tétreault devant la Maison alternative en développement humain (MADH).

Dans le cadre d’une série de reportages sur la crise du logement qui sévit dans la région maskoutaine, le Journal Mobiles s’est penché sur différents groupes de la population qui sont plus lourdement affectés par la pénurie de logements sociaux et abordables ici, à Saint-Hyacinthe, et dans les localités avoisinantes de la MRC. Grâce à l’aide de la concertation maskoutaine en matière de logement qui inclut des organismes communautaires locaux, votre journal écrit communautaire vous plonge ce mois-ci dans la réalité des personnes vivant avec des troubles de santé mentale.

 

Même si les annonces se multiplient en matière de création de logements abordables, certaines franges de la population maskoutaine ont de la difficulté à se loger selon leurs moyens. En tête de liste figurent les personnes vivant avec un trouble lié à la santé mentale et incapables d’adhérer au marché du travail en raison de leur condition. Celles-ci ont de plus en plus de difficulté à trouver un logement salubre à un coût qui respecte leur capacité de payer, et ce, malgré l’indexation de leur chèque en 2022.

De gauche à droite, Françoise Pelletier, Emilie Auclair, Annie Guindon, Christiane Laplante, Céline Langelier, Sherylane Turcotte, Laurence Tétreault devant la Maison alternative en développement humain (MADH).

« Plusieurs personnes nous disent chercher des logements subventionnés (HLM), puisqu’il est devenu difficile de subvenir à leurs besoins de base avec le prix du logement. Certaines personnes voient 75 % du montant de leur chèque s’en aller directement pour leur loyer. Ça ne leur laisse pas grand-chose pour manger et les autres dépenses essentielles », a fait savoir Françoise Pelletier, cogestionnaire de la Maison alternative en développement humain (MADH).

Bien que celle-ci salue les initiatives mises de l’avant par le gouvernement du Québec, elle considère que l’aide demeure trop partielle. La mission des organismes comme MADH doit être soutenue et indexée financièrement par Québec pour réussir à répondre aux besoins d’une clientèle fragilisée comme les personnes qui vivent au quotidien avec un trouble de santé mentale ou encore une limitation fonctionnelle.

Même si le Programme de solidarité sociale du Québec prévoit un chèque de 1 138 $ pour les personnes qui vivent avec des troubles de santé mentale comme la psychose, la schizophrénie ou la névrose, ceux-ci doivent faire produire un rapport détaillé qui atteste l’incapacité d’un individu à exercer les tâches liées à un emploi. La plupart du temps, les personnes doivent attendre plusieurs mois afin d’obtenir un rendez-vous à cet effet.

De plus, les personnes vivant avec ces troubles ne veulent pas être marginalisées par les institutions. Peu d’entre elles vont disposer de l’attestation qui permet d’obtenir le statut prévu par la solidarité sociale. Ces personnes reçoivent donc la prestation d’aide sociale moins généreuse et fixée à 832 $ mensuellement pour l’année en cours.

L’étude la plus récente effectuée par le Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec (RCLALQ) en juin 2022 révélait que le prix moyen pour un appartement avec une seule chambre (3 ½) atteignait la modique somme de 854 $ par mois, ce qui dépasse la prestation d’aide sociale du gouvernement pour un adulte.

« Bien que plusieurs projets aient été annoncés pour du logement abordable, ça prend aussi un investissement important pour la construction de logements subventionnés à Saint-Hyacinthe. Le marché locatif actuel ne peut répondre aux besoins des personnes vivant avec un trouble de santé mentale actuellement. La situation est devenue critique », a rappelé Françoise Pelletier.

Au 1er juillet dernier, la situation n’était guère rose pour les organismes communautaires qui se spécialisent dans l’aide aux personnes fragilisées. Selon la cogestionnaire de MADH, cet enjeu sera adressé aux politiciens de l’Assemblée nationale en vue de la campagne électorale qui devrait être déclenchée lors des deux prochaines semaines.

Le logement subventionné fait la différence

Pour une personne vivant avec un trouble de santé mentale comme la schizophrénie, les défis peuvent être nombreux. Le fait de bénéficier d’un logement subventionné par l’État peut permettre à un individu de se prendre en main. C’est ce qu’a vécu Gaétan*, un homme vivant avec la schizophrénie depuis plusieurs années.

Cet homme n’allait pas bien quand il s’est tourné vers de l’aide. Rencontré par les gens d’ MADH, il a entamé les démarches nécessaires pour avoir accès au Programme de logement sans but lucratif (HLM). Ce programme permet aux personnes fragilisées d’avoir accès à un logement dont le coût ne dépasse pas 25 % de leurs revenus.

« Ça m’a permis de respirer. Ce n’est pas compliqué, cette aide m’a sauvé la vie. Je n’allais vraiment pas bien et si ce n’était pas de cette aide, je pense que je ne serais plus ici pour vous en parler », a raconté Gaétan.

À partir de ce moment-là, cet homme s’est pris en main. Il a débuté avec de petits défis quotidiens comme les tâches ménagères, puis il s’est trouvé des occupations, il a soigné son alimentation, etc. Plus les mois avançaient, plus il retrouvait une motivation qu’il avait perdue avant de bénéficier de son logement subventionné.

Dans sa quête pour retrouver une meilleure qualité de vie, Gaétan a même commencé à faire des petits boulots légers. Cela lui donnait confiance en lui en plus de lui faire quelques sous de plus. Les idées noires l’ont également quitté à partir de ce moment-là. C’est comme s’il avait repris goût à la vie.

« C’était vraiment une métamorphose impressionnante entre le jour où il a fait appel à nos services et maintenant. C’est la preuve que de subventionner le logement de ces personnes en situation précaire, ça fait une différence plus grande qu’on peut le penser dans la vie d’un individu », a renchéri Françoise Pelletier.

Toujours en quête de plus d’autonomie, Gaétan est heureux de contribuer chaque jour davantage à la société. Pour lui, c’est important de faire sa part comme citoyen québécois.

* Nom fictif pour préserver la confidentialité