Chronique

Jacques Parizeau, l’humain

J'ai rencontré Jacques Parizeau à quelques occasions lorsque j'étais responsable des communications pour le député de Saint-Hyacinthe-Bagot. Lorsque j'ai appris son décès, la semaine dernière, il m'est revenu en mémoire deux anecdotes qui m'avaient démontré que derrière le célèbre politicien, il y avait aussi un humain.

C'était un peu avant l'élection fédérale de 2000. Il devait prononcer un discours lors du cocktail de financement du député Yvan Loubier. L'activité se déroulait dans une salle de réception du petit rang Saint-François.

On m'avait demandé de l'accompagner pour indiquer la route. Monsieur Parizeau ne conduisait pas, moi non plus. J'étais donc assis, à l'avant, avec son chauffeur et garde du corps. Lui était assis à l'arrière.

Voyant défiler depuis plusieurs minutes les champs de blés d'Inde, il me demande : « Est-ce que vous cultivez autre chose que du maïs, par ici? » Et je lui réponds : « Oui, on fait aussi pousser du pot ».

Il a bien ri et cela a permis de détendre un peu l'atmosphère parce que, je l'avoue, j'étais assez impressionné d'être assis dans la même voiture qu'un ancien premier ministre.

Ce qui m'a étonné, cependant, c'est que plus on approchait de la destination, plus il semblait nerveux. « Vous êtes sûr que je n'ai rien à craindre? » m'a-t-il demandé. Comment un homme d'une telle envergure pouvait-il s'inquiéter de rencontrer un groupe de citoyens venus l'entendre?

Je me suis alors souvenu que deux ans auparavant, en 1998, il s'était fait entarté alors qu'il prononçait un discours devant des étudiants d'un cégep de Montréal.

Imaginez comment devait se sentir cet homme après avoir reçu en pleine face une tarte à la crème, lui qui avait tant fait pour le Québec et qui adorait s'adresser aux jeunes. Manifestement, ce geste idiot avait laissé des traces…

***

L'autre souvenir qui m'est revenu se passe à une autre époque, mais pas très éloignée. J'avais décidé de réaliser une vidéo pour présenter lors d'une investiture du député Yvan Loubier qui avait lieu dans une salle de cinéma de Saint-Hyacinthe.

La vidéo retraçait le travail du député comme critique de l'opposition en matière de finances. Comme « punch » de la fin, j'avais eu l'idée de demander à Jacques Parizeau de livrer un témoignage. Je savais que les deux hommes se connaissaient bien et s'estimaient réciproquement.

J'ai donc pris rendez-vous et je me suis rendu à son bureau de Montréal avec un cameraman.

Il nous attendait. Sans plus attendre, nous nous sommes installés. « Est-ce que ma cravate est droite? » s'est-il inquiété.. « C'est ben correct », je lui ai répondu.

Sans texte, il a alors vanté les accomplissements du député Loubier avec verve et aplomb. Visiblement, il s'était préparé. Aucun blanc, aucune hésitation : « one take » comme on dit dans le jargon.

Après coup, il me demande : « Est-ce que c'était correct? ». Il me demande, à moi, si c'était correct. Je n'en revenais pas. Un homme d'une telle envergure qui se souciait de mon avis.

Oui, Monsieur Parizeau, c'était ben correct…