Chronique

Le plan destructeur de trottoirs

paul-henri_freniere

Ça n’arrive pas souvent que les médias nationaux s’intéressent à Saint-Hyacinthe. Et lorsque que ça arrive, c’est rarement pour de bonnes raisons. Rappelons-nous les poissons morts en 2016, le kiosque des Hells Angels à l’exposition agricole en 2017. Cette année, c’est la démolition de nos trottoirs qui a attiré l’attention de Radio-Canada.

C’est arrivé avant même que la Ville n’émette un communiqué pour l’annoncer ou ne publie sur son site web le « Plan directeur des trottoirs ». C’était bien caché au fond du tiroir.

Non, il aura fallu qu’une citoyenne de la petite rue des Samares aperçoive par hasard un arpenteur prendre des mesures pour apprendre qu’on allait détruire le vieux trottoir plutôt que de le remplacer.

Pétition en main, elle et quelques voisines se sont rendues à la séance du conseil municipal pour dénoncer l’affaire. On craignait, à juste titre, pour la sécurité des piétons, principalement et les personnes âgées et les enfants livrés à la rue durant l’hiver.

Mais le fameux plan directeur était déjà adopté majoritairement par les élus municipaux. Seuls les conseillers Bernard Barré de La Providence et Jeannot Caron du district Cascades s’y sont opposés.

Sur les 232 kilomètres existants, on projette d’en détruire 83 à plus ou moins long terme. C’est plus du tiers des voies piétonnières de la municipalité. Pour faire belle figure, on promet d’ajouter 17 kilomètres de nouveaux trottoirs principalement dans le secteur Sainte-Rosalie.

Combien de Maskoutains étaient au courant de cela? À peu près personne.

Pourtant, pas plus tard que l’été dernier, le maire et les membres du conseil ont visité chacun des quartiers lors d’une vaste tournée de consultation. À ma connaissance, jamais il n’a été question de l’enlèvement des trottoirs même si le fameux « plan destructeur » était déjà dans leur carton.

Une question d’équité?

Comme argument principal, on invoque une question d’équité entre les citoyens. Les résidents qui n’ont pas de trottoir devant leur maison n’ont pas à payer pour ceux qui en ont un, avance-t-on. On parle ici des coûts d’entretien et de déneigement.

Or, quels sont les secteurs où les trottoirs sont inexistants ou presque? Principalement les zones rurales et les nouveaux développements où l’on n’a pas jugé bon d’en installer. En général, ce sont des secteurs aisés où les résidents ont des automobiles.

Pour les quartiers plus anciens, construire des trottoirs allait de soi lorsqu’on développait. On pensait naturellement à la sécurité des piétons. Et les propriétaires ont payé pour cela.

Lorsque dans les prochains mois ou les prochaines années, ils verront arriver les marteaux-piqueurs pour détruire cet acquis de plusieurs décennies, pas sûr qu’ils seront bien contents.

Actuellement, ce projet municipal n’est pas bien connu de la population. Mais au fur et à mesure qu’il le sera, j’ai l’impression qu’il sèmera la grogne chez plusieurs.

Et ce ne sont pas les fonctionnaires municipaux ayant concocté ce plan destructeur qui en paieront le prix politique. Ni leur patron qui a vendu l’idée au conseil municipal pour des raisons d’économie, j’imagine. J’ai plutôt l’impression que ce sont les élus de chaque quartier, ainsi amputé de ses trottoirs, qui écoperont à la prochaine élection.