Chronique

La caricature controversée

Marie-Claude Morin.

Difficile de ne pas en parler. Une caricature parue la semaine dernière dans l'hebdo local a fait beaucoup jaser. Et si je me fie aux réseaux sociaux, les réactions furent toutes négatives.

Rappelons les faits. La députée Marie-Claude Morin, en toute franchise, dévoile publiquement sa bipolarité pour expliquer sa longue absence à son travail. Une semaine plus tard, le 24 octobre, le journal publie une caricature montrant la députée qui déclare avec un large sourire : « Je suis bipolaire! ».

En exergue, on peut lire : « La sortie de la députée Marie-Claude Morin inspire les candidats à l'investiture bloquiste ». Et l'on voit, en arrière-plan, Michel Filion qui réplique : « Moi je suis balance! » et Ève-Mary Thai Thi Lac qui répond : « Et moi je suis verseau! ».

Si je comprends bien le sens du message, on veut indiquer dans un premier temps que les candidats bloquistes veulent aussi se faire remarquer. À un deuxième niveau, en clamant leur signe astrologique, ils banalisent l'aveu de la députée. Comme si un problème de santé mentale ne serait qu'une façon, pour la députée, de se faire de la publicité.

Non seulement cette caricature est de très mauvais goût, mais elle est pernicieuse. D'abord elle n'est pas drôle, ce qui devrait être le but de l'exercice, n'est-ce pas? Une caricature peut mettre en relief le côté loufoque de certains agissements d'un politicien dans le cadre de ses fonctions – ce qui est de bonne guerre -, mais lorsqu'elle ridiculise un problème aussi personnel et si sérieux, là elle tombe dans la pure méchanceté.

Marie-Claude Morin. La députée aura beau dire que comme politicienne, elle est capable d'en prendre, je n'y crois pas. Les politiciens sont aussi des êtres humains qui ont leur sensibilité. Dévoiler sa bipolarité lui a demandé du courage. Et obtenir de l'hebdo local une telle réception a dû lui faire mal, très mal.

Elle a répliqué très rapidement à la direction du journal en réclamant des excuses. Pas pour elle, mais pour toutes ces personnes qui souffrent de maladie mentale et qui ont pu se sentir ostracisées par ce fâcheux dessin.

Marie-Claude Morin se demande également comment on a pu « autoriser » la publication de cette caricature. Or, à ce que je sache, Patrick Dauphinais n'est pas vraiment un caricaturiste qui choisit lui-même ses sujets, mais plutôt un illustrateur qui répond aux commandes de ses clients.

À chaque semaine, le rédacteur en chef lui transmet le thème, les mots à écrire, et lui envoie les photos qui correspondent. Dauphinais traite les photos par ordinateur pour leur donner une allure un peu grotesque et agence le tout.

La caricature se retrouve toujours dans la page éditoriale et ce n'est pas pour rien : c'est un statement du journal. Alors quoi conclure?

On peut en déduire que cela démontre une totale insensibilité de la part des responsables du journal. Mais cette insensibilité naîtrait de quoi, sinon de l'ignorance.

Pour traiter la bipolarité comme un sujet à raillerie, il faut ne pas pas connaître les douleurs morales que vivent les personnes qui en souffrent. Ou ne pas vouloir les connaître…

Curieux pour un organe d'information dont le slogan est : « pour savoir… et comprendre ».