Chronique

Le Bloc en miettes

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Ainsi, Martine Ouellet n’aura pas gagné son pari de demeurer chef du Bloc québécois. Elle aura marqué le plus récent chapitre d’une longue dégringolade. Un chapitre caractérisé par les disputes, les affrontements et les effets de toge qui viennent avec. Résultat, aujourd’hui le Bloc est en miettes.

Il faut se rappeler un peu l’histoire. À peine fondé, le Bloc arrive deuxième à l’élection de 1993 derrière les Libéraux de Jean Chrétien. Ironiquement, le parti souverainiste devient « L’Opposition officielle loyale de sa Majesté » à Ottawa. Les Anglos sont sous le choc.

La formation québécoise devait mettre la table pour le référendum de 1995 sur l’indépendance. Le chef Lucien Bouchard disait que le succès de son parti se mesurerait à sa brièveté.

Mais voilà, on connait le résultat : une défaite crève-coeur de quelques centaines de voix. Il fallait donc que le Bloc se trouve une autre mission en attendant la prochaine consultation référendaire. Elle était déjà trouvée : défendre les intérêts du Québec à Ottawa. Me semble que c’était clair !

Avec une équipe nombreuse et motivée – bénéficiant d’un service de recherche comme Opposition officielle – le BQ a pris sa mission au sérieux.

Le député de Saint-Hyacinthe-Bagot a joué un rôle important comme porte-parole en matière de finances. Yvan Loubier s’est attaqué farouchement au déséquilibre fiscal. Il a démontré avec compétence, chiffres à l’appui, que le gouvernement fédéral nageait dans les surplus tandis que Québec était étranglé par ses obligations constitutionnelles comme la santé et l’éducation.

Un chroniqueur politique de La Presse (eh oui) avait écrit que Loubier était l’économiste le plus compétent de la Chambre des communes. Cette opinion était largement partagée, même par des opposants fédéralistes.

D’autres députés du Bloc ont apporté des contributions significatives dans l’intérêt du Québec et même des autres provinces. On peut citer l’obtention d’une loi antigang, la cession des programmes de formation de la main-d’œuvre au Québec, la rétroactivité pour les aînés du programme de Supplément de revenu garanti, etc.

Mais peu à peu, au fil des années, l’appui populaire a diminué et, conséquemment, la représentativité du Bloc à la Chambre des communes. Il faut dire aussi que les médias s’en sont un peu désintéressés.

Les ténors du parti sont passés à autre chose, se servant parfois de la notoriété qu’ils avaient acquise comme élu pour poursuivre une carrière lucrative dans le privé. Mais c’était leur droit.

Vous savez quoi, je pense surtout à ces centaines d’hommes et de femmes qui ont milité pour la souveraineté pendant 10 ans, 20 ans et même 50 ans pour ceux de la première heure. Certains sont morts en cours de route n’ayant jamais vu leur rêve se réaliser.

Ils ont donné du temps, de l’énergie et souvent de l’argent pour faire élire la personne qu’ils croyaient pouvoir représenter leurs aspirations. Malheureusement, certains égos ont pris le dessus sur la cause.

Je pense aussi à ces jeunes qui se sont engagés plus récemment dans l’action politique. Que feront-ils de leurs aspirations, de leur volonté de vivre dans un monde meilleur? Il faut leur faire confiance. Ils sauront bien créer autre chose.