Françoise Pelletier
Le Roy aux oubliettes
Alors que l’ex-blogueur Gab Roy a reçu une sentence de 18 mois de prison pour avoir eu des contacts sexuels avec une mineure aujourd’hui, nous pourrions le laisser sombrer dans l’oubli, se dire qu’on en a assez parlé, et que de fesser sur quelqu’un qui est déjà à terre est d’assez mauvais goût.
Je n’ai jamais été de bon goût ou de bon ton, pas plus que je n’ai été fan de Gab Roy et de son humour trouble et sexiste. Et malgré toutes mes espérances de ne plus avoir à en entendre parler davantage, je me dis que finalement, tant pis, j’aurai ajouté au bruit.
Dire d’abord que si je n’ai pas écouté la vidéo que son ami à l’humour aussi douteux que lui a tournée et dans laquelle il exprime des remords, j’ai quand même été avisée qu’elle est parue juste avant que ne soit prononcée sa sentence aujourd’hui. Que cette manœuvre, aussi bien intentionnée soit-elle, use quand même encore de canaux de privilégiés, c’est‑à‑dire des hommes blancs hétéros (et jeunes) qui ont un auditoire sacrément large sur le Net. Que oui, j’espère bien que les colons qui suivent ces deux‑là (ou les ont suivis) ont compris le message : le victim-bashing, ça fait partie du problème social plus large dans lequel Roy s’est engoncé.
Que la victime, c’est la victime, et l’agresseur, c’est l’agresseur. Que le problème, ce n’est pas qu’il soit intelligent, ou nono, comme certains de ses acolytes passés ont tenté de nous le faire croire. Ce qu’il faut dire, c’est qu’il a été pris dans un système de pouvoir, où il jouissait de privilèges, et dont il a abusé. C’est toute la différence du monde entre reconnaître aussi que ce qu'il a fait était de la nature du contrôle, avant que d’être de nature sexuelle. Que ce n’est pas non plus le fait d’un monstre fini. C’est le dérapage de quelqu’un qui a été mis un peu trop haut sur sa propre échelle narcissique, et qui s’est planté king size en planant au-dessus non pas du bon goût, mais d’autres personnes, de femmes et de filles. Et reconnaitre aussi qu’il n’a pas été le seul à le faire. Que si son humour n’avait pas rejoint autant d’autres personnes, que ce drame pour lequel il va en prison n’aurait peut-être pas eu lieu, possiblement. Roy a été supporté, fortement encouragé pour arriver là où il s’est rendu. Il a été encouragé à agir comme un cave macho. Je ne dis pas qu’il n’est pas entièrement responsable de ses actes, non, pas du tout. Il l’est. Je dis simplement que selon ce que j’en comprends, il n’aurait pas pu se rendre là s’il n’avait pas été supporté à la fois par un auditoire de suiveux machos ascendants misogynes, et par une société qui est imprégnée de la culture du viol. Une société dans laquelle les zones grises passent pour des consentements tacites et préparent le terrain pour que des abus prennent place.
Une société qui crie sa soif de liberté d’expression et qui fait aussi passer l'incitation à la haine des femmes pour un exercice de cette liberté. Et elle peut bien crier comme ça lui chante, puisque de fait, la propagande haineuse contre les femmes n’est pas reconnue en vertu du code criminel. On n’a pas fini d’entendre talker de la shit au nom de la liberté d’expression. On va surtout faire grand cas des évènements autour de Charlie Hebdo et de la liberté de religion et de conscience. En oubliant toutefois que si la propagande haineuse contre les religions et les homosexuels est sanctionnée au niveau criminel, la propagande haineuse et l'incitation à la haine des femmes ne le sont toujours pas. Je sais, je me répète. Je serais ben ben contente de ne pas avoir à le faire.
Alors oui, bien sûr, Gab Roy s’en va pour un temps aux oubliettes. On peut espérer que ça ait un effet réparateur pour la jeune victime, et que personne ne soit assez débile sur le Net pour s’en prendre à elle, encore. On peut aussi espérer que ça ait un effet sur les personnes qui suivaient Gab Roy, et que ça les fasse réfléchir. Mais on ne peut pas non plus tout mettre sur ce coup‑là. Me semble qu’il faut qu’on se sorte la tête du cul et qu’on s’arrange pour faire changer les choses, à commencer par le système de justice lui‑même, qui est éminemment sexiste, à l’image de la société. Là, on pourra dire qu’on a changé quelque chose d’important.
Ça vous tente-tu de faire du bruit ?
Re: Le Roy aux oubliettes
Les « oubliettes », c’est vite dit. Roy sera probablement dans un établissement confortable, à sécurité minimum, avec droits de sortie quand il en demandera, et libération au sixième de sa peine – c’est la norme – juste à temps pour le printemps.
Bref, rangeons les violons.
Re: Le Roy aux oubliettes
C’est bien le commentaire de quelqu’un qui parle pour dire n’importe quoi (le sixième c’est la norme! Quelle connerie!) Au lieu de ranger leur violon, certains rangent leur cerveau.
Sortir au sixième n’existe plus depuis longtemps et je ne crois pas que Roy y ait eu droit de toute façon.
Je ne connais rien de ce Roy et ce que j’en entends dire ne me donne pas le goût d’en connaître plus. Mais il fait arrêter de dire que les prisons sont confortables et que ce ne seront que des vacances.
Les droits de sorties sont un privilège et ce n’est pas tout le monde qui y a droit. De plus elles ne sont pas disponibles au début d’une sentence. J’ai été six ans en prison et je n’en ai jamais eues.
De plus Roy servira sa sentence dans une prison provinciale et c’est loin d’être une partie de plaisir. Lorsque j’y étais il n’y avait pas de sorties du tout sauf pour des funérailles. Je ne sais pas où il habite mais il n’y a pas de prison provinciale à sécurité minimale à Montréal.
De plus la fin d’une sentence, ce n’est pas à la sortie de prison. Cet homme est puni pour le reste de sa vie. Ses problèmes ne termineront pas au printemps.
Je ne prends pas sa défense, je ne connais rien de son histoire, je suis seulement las d’entendre toutes ces conneries.
Re: Le Roy aux oubliettes
Premièrement , il y a deux prisons provinciales à Montréal.
Deuxièmement c’est un vrai camp de vacances pour détenus pour y avoir travailler pendant plus de dix ans…
Les prisons américaines là c’est pas du chouchoutage…
Re: Le Roy aux oubliettes
Je sais qu’il y a deux prisons provinciales à Montréal. J’ai écrit deux articles sur ces prisons sur mon blog (en fait plus que deux mais deux pour en faire la visite). Il suffit de taper « visite de la prison de Rivière-des-Prairies » dans google pour en trouver un (Bordeaux pour l’autre). J’ai vécu 13 mois à RDP et ce n’était pas un camp de vacances. Peut-être pour quelqu’un qui est de l’autre côté de la vitre et qui regarde ce qui se passe de l’autre côté. Ça doit être bien divertissant.
Je ne connais pas de camps de vacances où on oblige les gens à dormir avec des meurtriers.
Je ne connais pas de camps de vacances où les « vacanciers » doivent prendre soin de quelqu’un qui a l’alzheimer et qui ne sait même pas où il est, un camp de vacances où les vacanciers doivent habiller le monsieur car il partirait à la cour complètement nu.
Je ne connais pas de camps de vacances où les gens doivent porter les mêmes vêtements pendant deux semaines s’ils n’ont pas de famille pour leur en apporter.
Je ne connais pas de camps de vacances où les gens doivent dormir pendant des jours dans des bull pen et aller aux toilettes devant tout le monde.
Je ne connais pas de camps de vacances où les gens doivent dormir par terre dans le gymnase et se promener avec une serviette autour des fesses pendant qu’ils lavent leurs vêtements dans la laveuse que les autorités ont installée dans les toilettes du gymnase.
Je ne connais pas de camps de vacances où on doit « décrocher » son coloc qui a essayé de se pendre et dont il faut ensuite s’occuper par la suite car il risque de recommencer.
Je ne connais pas de camps de vacances où les gens se battent à coup de crayons. Je ne connais de camps de vacances où les moniteurs ne peuvent pas aller dans les dortoirs des « vacanciers » parce que c’est trop dangereux.
Je ne connais pas de camps de vacances où ils viendront n’importe quand fouiller tes choses et, juste pour rire, faire un gros tas au milieu de la chambre avec les effets de tout le monde mélangés (à trois dans une cellule pour deux). Plus moyen de savoir à qui sont les brosses à dent, les produits d’hygiène, les draps. Le shampoing vidé sur les documents légaux.
Je ne connais pas de camps de vacances où on rira de toi si tu dis que tu as un problème de santé urgent. Je ne connais pas de camps de vacances qui prennent les vacanciers au hasard pour les transporter de location en location sans raison.
Je ne connais pas de camps de vacances dont on revient avec le réflexe de s’asseoir dos au mur pour toujours voir qui arrive vers nous.
Je ne connais pas de camps de vacances où on peut voir l’endroit où on pendait les gens.
J’ai vécu 4 ans dans les prisons américaines et je m’y sentais plus en sécurité. J’ai toujours vu un médecin le jour même où je l’ai demandé. On nous donnait des vêtements. On pouvait recevoir des magazines et des livres. On pouvait accéder souvent à la bibliothèque (à RDP c’était presque jamais et ça a été même fermé pendant des mois). Les conditions y sont difficiles c’est vrai mais les prisons par où je suis passé avait beaucoup d’avantages comparativement à RDP. Il faut arrêter de dire que les prisons québécoises sont confortables et se contenter d’être « mieux » qu’aux États-Unis. C’est se contenter de pas grand chose. Ce serait comme dire: « mais je suis plus intelligent que Harper ».
Quelqu’un qui dit avoir travaillé dix ans dans une prison de Montréal et dit que ce sont des camps de vacances est un menteur et n’y a jamais travaillé ou un imbécile qui ne méritait pas d’y travailler. J’ai beaucoup de respect pour le travail des gens qui travaillent en prison mais, comme partout, il y aura toujours des gens qui font ce travail pour les mauvaises raisons.
Alors Mme Catherine, combien auriez-vous payé pour y séjourner dans ce camp de vacances?
Re: Le Roy aux oubliettes
Des prisons provincials minimun !!! Ça n’existe pas. Avant d’écrire quoi que ce soit, assurer vous d’être sûr que vous ne dite pas d’imbécilité flagrante. Et je reste polie… La dernière fois que j’ai été a RDP, j’ai passer 7 jours dans un Bull pen de 12 pied par 12 pied avec 13 personnes à dormir sur le plancher et sans me laver. Beau camp de vacance !
Re: Le Roy aux oubliettes
Très belle analyse! Merci! 🙂
Re: Le Roy aux oubliettes
merci…encore une fois, de dire les chose d’une façon que personne n’a assez de « guts » pour faire…merci.