Paul-Henri Frenière
Respecter le centre-ville
Un centre-ville, c’est un peu comme une vieille personne : elle a du vécu. On y fait attention, on ne la bouscule pas, on la respecte. Et lorsqu’elle est malade, on la soigne. On ne lui administre pas un électro-choc.
Comme dans bien d’autres municipalités, le centre-ville de Saint-Hyacinthe a des problèmes de santé. Il faut le comprendre, il a presque 200 ans.
Toute l’histoire de la naissance de la ville y est concentrée. C’est là que nos ancêtres ont commencé à travailler, à faire du commerce et surtout à se rencontrer. Un marché, une église, une école, des manufactures et des magasins : la base d’une société quoi.
Bien sûr que tout ça a évolué au fil des années. La plupart des manufactures ont été démolies ou ont changé de vocation. L’église est devenue une salle de spectacles, mais on a fait la transformation en respectant l’architecture initiale.
Le marché public a pris un coup de vieux, c’est normal. On est en train de le rénover avec attention, en prenant son temps. Bref, avec respect lui aussi. Au fil des années, on a démoli ou rénové des maisons, certes, mais sans tout chambouler autour.
Une rivière coule aux abords de ce quartier, c’est une richesse. On y aménagera bientôt une superbe promenade après avoir consulté convenablement la population. Encore une fois, on a agi avec respect.
Comme une tonne de briques
Puis un jour, un riche entrepreneur, venu d’ailleurs, découvre la beauté des lieux. Il se dit : « Tiens, tiens, voilà un bel endroit pour construire ma trente-cinquième résidence pour retraités. Une grande tour avec vue sur la rivière. Ça va se louer vite! »
Tout de go, il présente son projet aux autorités municipales qui, éblouies par ces millions venus d’ailleurs, lui déroulent le tapis rouge. Et on est pressé, d’autres projets émergent et l’investisseur ne veut pas se faire couper l’herbe sous les pieds. Pas le temps de consulter. On présentera le projet une fois qu’il sera bien ficelé. La population n’y verra que du feu.
C’est comme une tonne de briques qui échoue dans un quartier résidentiel : une secousse dans un environnement urbain densément peuplé. Bien sûr, l’amas tombe dans un stationnement, vous direz, mais il y aura des dommages collatéraux. L’effet domino fera qu’on détruira des habitations pour faire de nouvelles places aux sacrosaintes automobiles. Commerce oblige.
Le quartier Christ-Roi n’est pas le nord de la ville : sa structure est fragile. On y plante pas une tour (à l’esthétique douteuse, à mon avis) qui masquera le paysage riverain durant des décennies. Au nord, on peut construire des tours, des centres d’achat ou de congrès, ça va, c’est du développement, c’est du progrès. On ne chasse pas les résidents pour autant.
Mais on ne débarque pas dans une plate-bande patrimoniale avec ses gros sabots, fussent-ils en argent. C’est comme planter un pieu dans une ruche d’abeilles. Et on voudrait qu’elles ne réagissent pas?
J’imagine que les autorités municipales ne veulent pas bulldozer le centre-ville. On dit vouloir le dynamiser, le revitaliser, le diversifier. Mais ne dit-on pas que l’enfer est pavé de bonnes intentions?
Le droit au respect
Bravo M. Frenière pour ce billet respectueux du point de vue des habitantEs du quartier. Le droit au respect des résidents, qu’ils soient riches ou pauvres, est non négociable, et la Ville se doit d’en être la première à le respecter. Mais comme vous le dites de si belle façon, «l’enfer est pavée de bonnes intentions». Et l’enfer sera bientôt tout le tour de nous, les résidents, si le projet de tour est accepté intégralement tel que présenté le 6 juin, sans mesures d’impacts sur la santé globale et l’environnement, et sans qu’on tienne compte de la préservation du tissu social du quartier. Une pétition demande d’ailleurs qu’un comité formé d’élus, de gens d’affaires et de citoyens-citoyennes, soit mis sur pied pour mesurer l’impact sur le centre-ville et pour faire des recommandations. À signer au kiosque de la Vente-Trottoir, près des Trouvailles de l’Abbé Leclerc sur Cascades, jusqu’à samedi soir. Soyons solidaires !!!
Wo Back les tours!
Comme pour justifier le fait que les chiffres ne tiennent même pas la route, M. Bilodeau disait le 6 juin : «Le projet est avant tout un levier extraordinaire pour amener d’autres investisseurs privés au Centre-ville».
Trop
Excellent résumé de la situation.
Un projet présenté avec un manque de respect pour tous ceux qui vivent et qui ont construit le centre-ville .
Mercille
Bravo pour cette opinion très sensible et humaine . J’ai découvert ce quartier par le festival de musique, l’église transformée en lieu de rencontre pour le BAPE sur le gaz de schiste ,le centre d’art et tout dernièrement mon frère y habite et j’ai pu apprécier la promenade sur le bord de la rivière ! Ayant voyagée dans plusieurs pays je n’en revenais pas de retrouver dans ce quartier une âme humaine et un côté pittoresque par sa diversité où des gens moins nantis puissent y vivre dans la paix et la beauté des lieux ! Ce projet est affreux et l’argent ne doit pas encore une fois massacrer votre quartier !
Et si la beauté rendait heureux
J’invite les élus et toute la population à lire ce livre écrit par François Cardinal et le très réputé architecte Pierre Thibault. Pourquoi enlaidir un centre-ville avec une tour qui ne cadre vraiment pas dans une urbanisation intelligente et humaine.si8p6
Comment massacrer un Centre-Ville inutilement.
Bravo pour cet excellent texte qui résume très bien ce dossier.
Je ne crois pas à la revitalisation du Centre-ville par cet investissement.
Il est vrai qu’une Tour située sur le bord de la Yamaska peut-être attirant. Par contre, le promoteur ne leur dira certainement pas que l’été c’est une rivière de roche que les heureux propriétaires de condos pourront observer en plus des odeurs qui, parfois, émanent de la charmante rivière.
Il reste une chose inconcevable, c’est la façon sauvage dont la Ville impose cette décision en bousculant tout le monde et en ne respectant pas ses citoyens contribuables.