Paul-Henri Frenière
Vox populi, vox Dei
Une campagne électorale est l’un des rares moments où le bon peuple se sent un peu écouté. Les élus sortants n’ont pas le choix s’ils veulent se faire réélire. Ceux et celles qui veulent prendre leurs places n’ont pas le choix non plus puisqu’on veut s’attirer la faveur populaire. Au final, c’est la population qui décide. « Vox populi, vox Dei », disait le proverbe d’un démocrate croyant : « La voix du peuple, c’est la voix de Dieu ».
Or, une fois l’élection passée, il arrive parfois – ou souvent – que notre élu n’agisse pas tout à fait comme on l’avait espéré. Qu’il prenne des décisions contestables, ou pire, complètement contraires à nos valeurs.
Si la contestation devient trop vive et persistante, notre élu a la fâcheuse habitude de dire : « Si vous n’êtes pas contents, vous avez juste à voter pour un autre à la prochaine élection ». Mais quatre ans, c’est long, c’est long longtemps.
Et voilà que l’on s’interroge tout à coup sur la vraie nature de la démocratie. Comme dirait l’autre, la dictature c’est « ferme ta gueule » tandis que la démocratie pourrait être « cause toujours mon lapin ».
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Cela m’amène à parler (encore une fois) de Réseau Sélection. Vous savez, cet absurde projet d’ériger une tour de 15 étages au centre-ville sur le bord de la rivière Yamaska. Sa construction est prévue pour le printemps prochain. À moins que, à moins que…
J’ai déjà écrit dans ces pages que ce dossier serait le principal enjeu de la campagne électorale que nous venons de traverser à Saint-Hyacinthe. Je n’avais pas tort.
On me dit que le sujet était sur beaucoup de lèvres ces dernières semaines. Peut-être pas sur toutes les lèvres, mais sur beaucoup. Même sur des lèvres provenant de quartiers en dehors du district Cascades où l’on projette de construire la fameuse tour.
Les conseillères et conseillers devant sortir de leur charge – ou de leur bulle? – ont fait du porte à porte et ont dû finalement écouter le bon peuple. Et le bon peuple, apparemment, est doué du gros bon sens : « ce projet n’a pas d’allure ».
La voix du peuple a si bien résonné que certains élus ont semblé vaciller dans leur détermination à appuyer le projet. Ils auraient changé leur fusil d’épaule ou s’apprêteraient à le faire
Quant au maire, se drapant malgré tout dans la légitimité d’un conseil municipal unanime, il promet qu’il ira de l’avant. Il avance qu’il s’agit d’un projet privé et qu’à ce titre, le promoteur est bienvenu d’y investir ses millions. Le bon peuple n’a pas à donner son opinion. Ou s’il le fait, comme dans cette pétition de plus de 2500 noms contre le projet, il n’a pas à en tenir compte.
À ce compte-là, si j’étais milliardaire et que je décidais de construire une tour de 15 étages sur l’emplacement du parc Casimir-Dessaulles, en face de l’hôtel de ville, personne n’aurait un mot à redire, du moment que j’allonge le fric.
Devrait-on en conclure que « La voix du milliardaire, c’est la voix de Dieu »?
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