Environnement

La Chibouet : un cours d’eau toujours préoccupant

L’agriculture intensive explique le mauvais état de la rivière Chibouet. Les dernières analyses ont permis de déceler pas moins de 31 pesticides dans l’eau de la rivière. Photo : Nelson Dion

L’état de la rivière Chibouet est toujours préoccupant, même si on note une légère amélioration au cours des dernières années.

Ce n’est pas d’hier que la rivière Chibouet retient l’attention. En 2019, Mobiles avait révélé la forte présence de pesticides dans ce cours d’eau. Cette même année, La Presse + l’avait même qualifiée de « rivière aux horreurs ».

Selon un récent rapport du ministère de l’Environnement et de la lutte contre les changements climatiques, les prélèvements d’eau effectués entre 2018 et 2020 ont permis de déceler la présence de 31 pesticides différents, soit 21 herbicides, 9 insecticides et un fongicide.

Cinq pesticides ont montré des dépassements du critère de vie aquatique chronique (CVAC), seuil qui met en péril la faune aquatique. Le CVAC a été dépassé pour au moins un pesticide dans 60% des échantillons en 2018, 76,7% en 2019 et 96,7% en 2020. Pourtant, « sur les trois années, la situation s’est améliorée par rapport à la période de 2015 à 2017 », indique le rapport.

Autre consolation: la concentration quotidienne de pesticides s’améliore au fil des années. « Dans l’ensemble, les profils montrent des concentrations plus faibles que ce qui avait été mesuré auparavant, notamment en 2015, poursuivent les auteurs. Les conditions plus sèches qui ont prévalu au cours des trois dernières années expliquent en partie cette situation. »

L’agriculture intensive explique principalement le mauvais état du cours d’eau. La rivière Chibouet draine un grand territoire qui s’étend de Saint-Hugues à Sainte-Hélène-de-Bagot, Saint-Nazaire d’Acton, Upton et Saint-Liboire. Or, 68% de son bassin versant est en culture. Le maïs est la culture dominante, couvrant 50,6% des terres, suivi du soya (32,9%).

Ces deux cultures requièrent l’emploi de nombreux pesticides dont le glyphosate, l’atrazine, le chlorantraniliprote et le thiaméthoxame. Comme la terre est nue entre les rangs, les fortes pluies ont pour effet de transporter les résidus de pesticides vers les cours d’eau.

La rivière Chibouet fait partie de quatre cours d’eau que le ministère de l’Environnement surveille plus attentivement.

Les solutions du côté des producteurs

Face à cette situation, le Comité de revitalisation de la rivière Chibouet a entrepris de mener une étude de caractérisation du cours d’eau.

« Une caractérisation permet d’établir un état de situation, explique la présidente de l’organisme, Laurianne Levert-Gauthier, également agronome. Une fois que les données terrain sont recueillies et analysées, cela permet de voir où sont les forces et où des améliorations sont possibles. »

L’enquête se fera à deux niveaux. Elle portera d’abord sur les berges de la rivière: qualité des bandes riveraines, habitat des poissons, espèces exotiques envahissantes, présence d’obstacles et érosion. Puis, elle s’attardera sur les pratiques culturales: travail du sol, fertilisation, rotation des cultures, etc.

Chaque propriétaire recevra une fiche qui regroupera l’ensemble des informations portant sur ses champs et les pistes d’améliorations possibles. Celles-ci pourront être multiples.

« C’est un ensemble de gestes qui font la différence, souligne l’agronome. Une gestion durable des terres agricoles incluant la gestion des pesticides, la mise en place de cultures intercalaires et/ou de cultures de couverture, l’intégration d’actions favorisant la santé des sols en sont quelques exemples. Du côté des bandes riveraines, on peut penser à des aménagements sur une zone élargie au-delà du réglementaire, mais aussi qui s’adapte à la composition et à la morphologie des sols. »

Mentionnons que l’organisme a obtenu une autre subvention afin de former un groupe de réflexion avec des producteurs pour réduire l’impact du passage de la machinerie agricole dans le cours d’eau.