
Marie-Claude Morin
Je me souviens des années 90. Il n’était pas si rare à l’école secondaire d’entendre des personnes en traiter d’autres de fif, de gouine, d’osti de tapette ou de garçon manqué. Et peu de personnes n’osaient prendre la parole, de peur d’être étiquetées également et de vivre à leur tour de l’intimidation, du harcèlement.
Certain-es s’en souviennent, d’autres non, mais la fin de cette décennie a été marquée notamment par le meurtre brutal de Matthew Shepard en 1998 au Wyoming. Matthew avait 21 ans et il était homosexuel. Et il y a eu de nombreux drames, partout dans le monde, depuis trop longtemps dirigés sur des personnes des communautés 2SLGBTQIA+.
Ainsi, si j’aborde l’histoire de Matthew plus qu’une autre, c’est parce qu’elle a inspiré une mobilisation incroyable de plusieurs communautés désirant combattre la haine par l’amour. L’histoire de Matthew a aussi inspiré de nombreux artistes voulant qu’il ne reste pas inconnu et qu’on connaisse son histoire afin que, plus jamais, quelqu’un ne soit à nouveau victime d’une telle violence gratuite. Cette mobilisation n’a certainement pas ramené le fils, le frère, l’ami. Mais, elle a assurément évité (certains) autres drames en faisant réaliser aux personnes alliées qu’elles ont la responsabilité de ne pas se taire face à la haine, l’intolérance et les discours décomplexés pointant tacitement des communautés qui désirent, en toute légitimité, vivre leur vie dans la dignité et dans le respect, tout en se sentant en sécurité.
En toute candeur, je pensais en 1998, qu’aujourd’hui, pas loin de 30 ans plus tard, nous serions rendus ailleurs en tant que société. Je réalise que non. Pas du tout. Nous pouvons bien évidemment parler de ce qui se passe dans le pays voisin. Mais, ici même, au quotidien, plusieurs personnes sont confrontées à cette banalisation des discours haineux et de la violence. Et ce ne sont malheureusement pas des cas isolés.
Le 17 mai souligne la Journée internationale contre l’homophobie, la transphobie et la biphobie. Cette date a été retenue afin d’honorer le 17 mai 1990, jour de la décision historique de l’Organisation mondiale de la santé de retirer l’homosexualité de la classification des troubles mentaux.
L’amour et la diversité ne sont pas des troubles mentaux.
Des études ont d’ailleurs été menées au Québec par des organismes communautaires travaillant auprès des communautés 2SLGBTQIA+ démontrant une montée de l’intolérance et une augmentation des niveaux de malaises face à la diversité dans certaines écoles.
Encore aujourd’hui, trop de personnes sont victimes, entre autres, de harcèlement, de discrimination et d’intimidation, en raison de leur orientation sexuelle, de leur identité ou de leur expression de genre. Des sondages révèlent que plus de 50 % des jeunes trans et non-binaires ne se sentent pas en sécurité à l’école, que plus de 80 % des jeunes des communautés 2SLGBTQIA+ ont vécu du harcèlement et de la violence en lien avec leur identité, que 11 % des femmes lesbiennes ont subi des expériences de harcèlement sexuel contre 4 % pour les femmes hétérosexuelles.
Il faut impérativement que ça cesse! Nous devons nous soutenir, prendre la parole et dénoncer ces comportements inacceptables. Nous avons le devoir de ne pas rester muet-te devant la violence, devant la haine. Nous avons tous-tes la responsabilité de ne pas fermer les yeux, parce que tout le monde a le droit au respect, à la dignité et à la sécurité.
La diversité est une richesse, ne l’oublions surtout pas.
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