Chronique

Habitations Trigone : la Ville aurait dû réagir

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Encore une fois, la Ville de Saint-Hyacinthe favorise le projet d’un promoteur qui va « bulldozer » une partie d’un quartier, avec tout ce que cela implique : démolition de maisons, éviction de locataires et bouleversements humains.

Les Habitations Trigone, dont le siège social est à Belœil, a vendu l’idée aux autorités municipales d’ériger un méga projet de 115 millions $ dans le secteur Sacré-Cœur, près de l’hôpital Honoré-Mercier. La Ville s’y est montrée favorable lors de la séance du conseil du 20 septembre dernier.

Or, une petite recherche sur Internet aurait permis aux administrateurs/administratrices et aux élus/élues de notre ville de savoir que la firme Trigone n’était pas sans reproches, loin de là. Pas plus tard que l’an dernier, en octobre 2020, l’émission d’affaires publiques La Facture, de Radio-Canada, lançait ce titre accablant : « Habitations Trigone, une pluie de poursuites ». On y apprenait que l’entreprise avait fait l’objet de pas moins de 200 poursuites en 20 ans

On y dévoilait que Trigone n’était qu’une « coquille vide » qui faisait affaire avec des sous-traitants plus ou moins compétents, ce qui entraînait plusieurs défauts de fabrication et un service après-vente déficient. Ces pratiques douteuses avaient également été relevées par l’Association des consommateurs pour la qualité dans la construction.

Ce reportage était si accusateur qu’il a donné lieu à une enquête fouillée de la Régie du bâtiment du Québec (RBQ). Dernièrement, la RBQ concluait que le groupe Habitations Trigone ne méritait pas la confiance du public et que, conséquemment, on lui retirait toutes les licences lui permettant d’opérer « pour des manquements graves et répétés aux lois », écrivait-on.

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Étrangement, ces révélations n’ont pas semblé ébranler le conseil municipal qui tenait sa dernière assemblée du mandat le 4 octobre. Le maire Claude Corbeil et le directeur général Louis Bilodeau n’ont pas donné l’impression qu’ils avaient lu les mêmes nouvelles que tout le monde.

En réponse à plusieurs questions venant de personnes dans la salle — et aux inquiétudes manifestées envers Trigone — on a indiqué que la Ville allait suivre les procédures habituelles, sans toutefois remettre en question la présence du promoteur sévèrement blâmé par la RBQ.

Le conseiller municipal du district Sacré-Cœur, David Bousquet, en a rajouté une couche en affirmant que la Ville n’avait pas le pouvoir « de juger la qualité du travail d’un entrepreneur ». Il a longuement insisté sur le fait que les locataires évincés seraient informés tout au long du processus. Or, un reportage de Cogeco nous apprenait, quelques jours plus tôt, que ces mêmes locataires, souvent âgés, avaient reçu des avis d’éviction avec la mention qu’ils devaient se trouver un nouveau logement à court terme. Un scénario déjà vu avec le Groupe Sélection, au centre-ville.

Encore une fois, la municipalité semble insensible au sort de certains de ses citoyens et de ses citoyennes pour privilégier les projets de promoteurs sans se soucier des répercussions humaines que cela implique.